Comme ton ombre

L'ouvrage:
Fin 2007.
Catherine Bailey vit dans un appartement. Tous les matins et tous les soirs, elle vérifie six fois qu'il est bien fermé. Elle vérifie toutes les fenêtres et la porte de son immeuble autant de fois. Elle vérifie que toutes ses affaires sont exactement à la bonne place. Elle ne peut faire ses courses que certains jours. Elle n'aime pas le rouge... Des choses qui paraissent anodines peuvent lui déclencher des crises d'angoisse.
Cathy tente de guérir d'une agression, d'une lente manipulation psychologique.

Critique:
Ce roman est porté par son personnage principal. En effet, malgré les reproches que je ferai au-dessous, je le pense réussi grâce à Cathy. Le lecteur s'identifiera facilement à elle. En outre, elle n'entre pas dans certains clichés pénibles. Par exemple, elle explique qu'au plus fort de la manipulation qu'exerce son amant, elle abandonne la lutte, et qu'elle comprend les femmes qui finissent par se laisser dominer. Cependant, elle n'abandonne pas vraiment, elle fait ce qu'elle peut, sachant qu'elle est cernée de toutes parts.
Elle sait pertinemment que Ses multiples vérifications sont de fausses assurances. Elle est incroyablement forte, et plus elle montre ses failles, plus on la sent faire un travail sur elle-même afin de s'en sortir.
C'est un personnage solaire, un espoir.

D'autre part, Elizabeth Haynes a parfaitement su montrer la manière dont quelqu'un peut manipuler une ou plusieurs personnes. Il existe bien des livres et des films montrant cela, mais ici, je trouve que c'est particulièrement réussi. Ce roman m'a, entre autres, fait penser à «Sourire en coin», de Nicci French. Je trouve qu'Elizabeth Haynes s'en tire mieux que Nicci French, car il y a moins d'invraisemblances, même s'il y en a..
De plus, la toute fin est très logique. Il aurait été impossible que le livre se terminât sans les dernières phrases.

Comme dans le roman sus-cité, il est peu crédible que la meilleure amie de la narratrice ne la croie pas, et préfère croire un inconnu, même s'il est séduisant, et joue les éplorés. Bien sûr, cela montre que l'amie en question est superficielle, et que le manipulateur est très fort, mais cela ne me convainc pas. Cathy aurait dit que Sylvia était juste une copine, j'aurais mieux compris. Je sais très bien que celle que je considère comme ma meilleure amie ne me dirait jamais d'aller me faire soigner si je lui disais que mon petit ami tente de contrôler ma vie.
D'autre part, le mépris du lecteur pour Sylvia sera renforcé à cause d'une ficelle également utilisée dans «Sourire en coin».
Entre parenthèses, je n'aurais jamais pardonné à une amie de ce genre d'avoir été si tranchée, si implacable, si fourbe!

D'une manière générale, il est un peu gros que tout le monde doute, à un moment ou à un autre, de l'histoire de Cathy. Même si cela paraît incroyable, quand on aime quelqu'un, et/ou quand on est médecin ou policier, on sait que ce genre de choses est possible. De même, il est assez surprenant qu'Alister et Stuart soient persuadés que Lee ne tentera jamais de retrouver sa victime.
Heureusement, Sam Holland n'est pas aussi pénible et bornée que les policiers de Nicci French.

La structure du livre m'a gênée. On suit la vie de Cathy à deux époques différentes en parallèle. En général, je n'aime pas ce genre de structures, mais certains livres s'y prêtent. Je pense que ce n'est pas le cas de ce roman. C'est pour maintenir une espèce de suspense, mais c'est artificiel. De plus, le lecteur sait très vite ce qui est arrivé à Cathy: le fait de passer sans arrêt de 2007-2008 à 2003-2004 donne plutôt un effet de lenteur, car le récit de ce qu'on a déjà deviné est retardé. J'aurais préféré un récit chronologique. Pour moi, le livre aurait eu plus de force. Certains me diront que si on sait tout de suite tout ce qui est arrivé en 2003-2004, on aura moins envie de lire 2007-2008. Au contraire, l'histoire du calvaire puis de la reconstruction de Cathy aurait gagné en profondeur, du moins, pour moi.
Le seul détail intéressant dû à cette structure est le fait que parfois, on trouve des télescopages entre les deux époques.

Attention! Passez au paragraphe suivant si vous n'avez pas lu le livre.
Le personnage de Stuart peut être agaçant à cause de son espèce de perfection... Et puis, sa rencontre avec Cathy semble trop fortuite... Je suppose que l'auteur a fait cela exprès pour que le lecteur soupçonne Stuart. Je préfère qu'il ne s'avère pas être un «méchant», mais je trouve quand même cette rencontre un peu mal amenée.

Remarque annexe:
Il me semble avoir repéré une éventuelle erreur de traduction. À un moment, Cathy remercie Stuart. Il lui répond: «Oh, ce n'est que de la soupe de poulet, mais vous êtes la bienvenue.» Je suppose qu'en anglais, il lui dit: «You are welcome.» On peut comprendre: «Ce n'est que ça, mais vous êtes bienvenue chez moi pour la déguster.» Cependant, après des remerciements, «you are welcome» veut généralement dire «de rien» ou «pas de quoi». S'il lui répond bien cela dans la VO, je suppose qu'il faut comprendre: «De rien.» Les deux traductions se défendent...

La version audio que j'ai entendue a été enregistrée par mon mari.
Ce livre m'a été offert par les éditions Presses de la cité

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