Une odeur de gingembre

L'ouvrage:
1903.
Mary McKenzie a vingt-et-un ans. Elle quitte son Écosse natale pour rejoindre Richard, un militaire, en Chine. Elle doit l'épouser. Elle a choisi ce mariage. Pourtant, elle se demande si sa décision est sage. Que ressent-elle vraiment pour Richard? C'est sur le bateau qui l'emmène en Chine qu'elle commence un journal intime.

Critique:
La quatrième de couverture nous apprend, entre autres, que ce récit est inspiré de faits réels. Je veux bien le croire, car le premier compliment que je ferai touche au réalisme du roman. À plusieurs reprises, je me suis surprise à espérer quelques événements qui auraient paru invraisemblables, mais auraient adouci la peine de Mary. Pourtant, il est peut-être mieux qu'ils n'aient pas eu lieu, mais que l'ensemble du livre soit réaliste et cohérent.

C'est la vie d'une femme qui est racontée ici. Une femme qui, dès qu'elle quitte ses parents, commence à changer. Elle perçoit très vite que sa mère a un esprit étriqué.
Mary ne fait pas toujours les bons choix. Elle le dit elle-même. C'est parce qu'elle choisira la facilité qu'elle souffrira mille maux avant de se résigner à ce qu'elle ne peut changer, et de tenter de prendre les bons côtés de l'existence. C'est un personnage fort, blessé, mais jamais amer. Certains pourraient la trouver insensible, voire un peu écervelée, je pense au contraire qu'elle a su s'adapter, aller de l'avant, sans se replier sur elle-même, sans s'aigrir. Il y aurait pourtant eu de quoi.
De plus, sous ses dehors de jeune fille un peu fragile et perdue, Mary ose des choses dont je ne l'aurais pas crue capable, et assume totalement ses choix.

L'auteur fait quelque chose que je n'aime pas, en général: des ellipses. Ici, cela ne m'a pas trop gênée parce qu'elles sont surtout vers la fin, et que les choses sont suffisamment expliquées pour que cela n'ait pas l'air bâclé.

Mary côtoie toute une galerie de personnages intéressants. En effet, ils ne sont pas tous tels qu'on pourrait les attendre. Malgré l'époque et la société, elle sait s'entourer de personnes qui réfléchissent, ne sont pas forcément guindées. Son amitié avec Marie, par exemple, est un peu étrange, car elle se teinte d'exaspération, et au départ, je l'ai trouvée quelque peu feinte. Pourtant, elle résiste au temps, à la distance, et surtout aux actes de notre héroïne que certains huent, et traitent en paria sans chercher à la comprendre.
J'ai eu du mal à comprendre Emma-Lou. J'admets qu'elle ne souhaite pas une vie de poule pondeuse, mais je trouve sa façon de le montrer totalement inappropriée. Dès le départ, ce personnage m'a mise mal à l'aise par ses réactions et sa façon d'être.

En filigrane, se dessine l'histoire de plusieurs pays, surtout la Chine et le Japon: leurs coutumes, leurs paysages, leurs odeurs, leur nourriture. Mary s'en imprègne, et les fait ressentir à son lecteur. Elle aimait profondément ces pays où elle ne fut pas toujours heureuse, mais où elle sut trouver une place, se faire comprendre de certains. À noter, par exemple, l'amitié quelque peu incongrue, voire interdite, mais toujours sincère, et dont elle a su apprécier la valeur, de son domestique chinois.

Éditeur: éditions de la Table Ronde.
La version audio que j'ai entendue a été enregistrée par Élisabeth Duclert pour l'association Valentin Haüy.
Je n'ai pas l'orthographe exacte du nom de la lectrice, je lui présente donc mes excuses si celui-ci est mal écrit.
La lectrice a une voix agréable et sympathique. Sa lecture est plutôt sobre, mais pas monotone.

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