L'ouvrage:
Voilà deux ans que Roy, le mari de Sarah Laden est mort d'un cancer. La jeune femme et ses deux enfants, Nate et Danny, tentent de reprendre pied dans la vie. Nate entre dans l'adolescence, et Danny semble sensible à l'extrême.
Ce matin-là, sortant de chez elle, Sarah rencontre Jordan Kendrick, le fils de ses voisins et amis, Marc et Courtney. Prenant pitié du garçonnet seul sous la pluie, elle lui propose de le déposer à l'école. Sur le trajet, il lui demande de s'arrêter aux toilettes. Au bout d'un moment, ne l'en voyant pas sortir, la jeune femme s'y risque. Elle découvre que l'enfant a fait une tentative de suicide.
Critique:
Il est des livres qui laissent une empreinte indélébile: «Le garçon d'à côté» est de ceux-là. J'ai été happée par cette histoire, cette atmosphère à la fois envoûtante et oppressante. On ne peut même pas alléger l'impression ressentie en disant: «Ce n'est qu'un livre.», car si Jordan n'a pas existé, il n'est que la représentation de tant d'enfants qui subissent, qui sont avilis, souillés, dépossédés, qui perdent leurs repères, qui doivent accepter la perversion de ceux qui devraient les protéger. Si toutes les histoires ne se ressemblent pas (les circonstances changent), le mal commis est le même.
Dans ce roman, Katrina Kittle aborde avec justesse et discernement tout ce qui peut découler de tels actes. Elle prend le temps d'expliquer, d'analyser, sans jamais tomber dans le pathos.
À l'instar de Sarah, le lecteur sera abasourdi et effrayé de constater à quel point on peut se tromper sur les gens, ce qui nous renvoie à notre propre impuissance à porter secours aux victimes. Je savais déjà cela, mais le lire ici, de manière si réaliste, m'a pétrifiée.
À travers l'histoire de Jordan, l'auteur explique certaines choses, bousculant les idées reçues. Par exemple, on dit souvent qu'une personne qui a été maltraitée dans son enfance maltraitera. Cela peut s'avérer, mais pas toujours. En outre, une personne maltraitée ne se comportera pas obligatoirement ainsi. L'exemple donné par l'auteur est celui de J. M. C'est un personnage plein d'espoir. Je ne sais pas s'il est possible de s'en sortir comme lui l'a fait, mais je l'espère.
D'autre part, je sais qu'il est extrêmement difficile de se mettre à la place des victimes, mais je n'arrive pas à comprendre ceux qui reproduisent le mal commis. Mieux que quiconque, il savent que c'est une destruction: pourquoi le font-ils subir? Je n'ai même pas réussi à plaindre le personnage qui agit ainsi dans le roman. Sûrement parce que cette personne se montre détestable et méprisable jusqu'au bout.
L'auteur évoque également les cas où les bourreaux n'ont jamais été maltraités. Je trouve cela plus franc. En général, on entend toujours dire que le bourreau est une ancienne victime.
Outre un sujet savamment abordé, Katrina Kittle a pris le temps de créer des personnages réalistes. Chacun (surtout la famille Laden) m'a semblé être épais. On a l'impression qu'on pourrait les rencontrer, que ce qui leur arrive et leur façon de le gérer pourrait être notre lot. J'ai d'ailleurs aimé que le lecteur ait tour à tour les points de vue de Nate, Sarah, et Jordan. Je pinaillerai en disant que j'aurais préféré que chaque chapitre soit à la première personne du singulier.
La famille Laden est aussi une note d'espoir. Si cette plongée dans la noirceur les dévaste, elle les fait évoluer, grandir. Cela les fait réfléchir, les force à faire preuve d'empathie... Par exemple, ils se rendent compte que certains mots, certaines attitudes peuvent être interprétés différemment par quelqu'un qui a vécu ce qu'a vécu Jordan.
Katrina Kittle insère une petite note humoristique: qui finira par faire à nouveau battre le coeur de Sarah?
La romancière a fait quelque chose que, d'habitude, je n'aime pas du tout, mais qui, ici, est très bien passé. Son introduction dévoile comment tout s'est terminé. Cela n'est pas gênant, d'abord parce qu'elle n'en dit pas trop: il est impossible au lecteur de savoir comment les choses ont pu en arriver à cette conclusion. Ensuite parce que ce roman est de ceux dont je préfère avoir ce genre d'indices.
Un roman coup de poing à côté duquel il ne faut pas passer, duquel on ne sortira pas, même après l'avoir fini.
La version audio que j'ai entendue a été enregistrée par mon mari.
Ce livre m'a été offert par les éditions Phébus
Édit du 21 octobre 2013:
Pour ceux qu'une version audio intéresse, il en existe une enregistrée pour la Bibliothèque Sonore Romande.
2 réactions
1 De birdie - 26/02/2012, 23:47
Je suis la 41e lectures,
Je pense que ce roman est captivant
2 De La Livrophile - 26/02/2012, 23:52
Tu écris «lol», toi! Ça me choque.
Ce roman est très bon, malgré son sujet. L'auteur maîtrise parfaitement son récit.