L'ouvrage:
Julia Abbott (dite Jules) est forcée de revenir à Beckford, sa ville natale, qu'elle a fuie après une enfance et une adolescence difficiles. En effet, sa soeur, Nel, se serait suicidée en se noyant dans la rivière. Nel était fascinée par cette rivière et ses noyées depuis son adolescence. Elle écrivait un livre sur le sujet. Sa fille, Lena, est persuadée qu'elle ne s'est pas suicidée.
Critique:
Pour moi, les bons côtés du roman sont la diversité des points de vue et l'ambiance que l'auteur parvient à créer. Les légendes entourant cette rivière dans laquelle il semble que certaines se jettent immanquablement sont assez impressionnantes. On comprend vite que cela n'est pas si simpliste, mais l'emprise de la rivière reste. J'ai trouvé cela très bien fait.
Quant à la diversité des points de vue, elle me plaît toujours lorsqu'elle est bien utilisée. Ici, comme dans «La fille du train», elle est pertinente. Elle aide à mieux comprendre les personnages, plongeant le lecteur au coeur de leurs peurs, de ce qu'ils croient, de leurs actes. J'ai beaucoup apprécié Jules qui, malgré des moments de faiblesse, tente de gérer sa vie au mieux.
Lena m'a semblé un peu compliquée, mais souvent, ses raisonnements sont intéressants. Elle sent qu'elle a besoin de davantage de cadre, se sent coupable de certaines choses, vient de perdre des êtres chers... Tout cela fait un mélange qui aurait de quoi rendre n'importe qui irascible.
Je n'ai pas vraiment apprécié Nel. Je comprenais son besoin de vérité, mais beaucoup de choses chez elle m'agaçaient. Cela ne dessert pas le roman. C'est un personnage bien pensé, avec ses défauts et ses faiblesses.
Les autres protagonistes sont intéressants. Qu'on les apprécie ou pas, ils ont tous quelque chose à dire.
L'intrigue ne m'a pas autant passionnée. D'abord, j'avais très vite deviné ce que voulait dire Nel avec son «Au fond, est-ce que tu as aimé ça?». Ensuite, il est normal qu'un auteur retarde ses révélations, sinon, le livre ne va pas loin. Certes, mais j'ai trouvé que les ficelles utilisées ici étaient très grosses. À propos de la mort de Cathy, on a d'abord un garçonnet apeuré qui hésite à dire ce qu'il sait, des diversions, etc. Certains auteurs s'en tirent bien mieux, car l'attente du lecteur est comblée par des éléments qui font qu'il oublie qu'il attend. Ici, cela n'a pas été le cas. De plus, concernant la mort de Cathy, la solution n'a pas été à la hauteur de mon attente. J'ai trouvé la raison bancale. Que Cathy soit morte ou non, ce qu'elle voulait éviter reste possible. Bien sûr, certaines choses sont plus difficiles à prouver, mais cela ne valait pas une mort. L'auteur a essayé de l'expliquer en s'attardant sur les circonstances, mais je n'y ai pas cru. C'était beaucoup trop gros.
Enfin, pour moi, il reste un point non éclairci: comment le bracelet de Nel s'est-il retrouvé ailleurs qu'au bras de sa propriétaire? Ici, c'est peut-être moi qui ai manqué l'explication.
Certains trouveront peut-être que la mort de Nel est aussi mal «justifiée» que celle de Cathy. Pour ma part, j'ai trouvé cela plus convaincant, mieux expliqué par des circonstances plus crédibles.
Je suis convaincue qu'il vaut mieux lire ce roman en audio. Pour moi, la performance des comédiens est un plus. Elle démarque l'ouvrage, accentue l'ambiance, rend bien l'état d'esprit des personnages.
Service presse des éditions Audiolib.
Les chapitres exprimant le point de vue de certains personnages (Jules, Lena, Erin, Sean et Josh) sont à la première personne du singulier, ceux montrant le point de vue d'autres sont à la troisième personne. L'éditeur audio a fait le choix (judicieux, à mon avis) de procéder comme suit: Ingrid Donnadieu interprète les chapitres du point de vue de Jules, Lola Naymark lit ceux du point de vue de Lena, Clémentine Domptail se charge de ceux d'Erin, et Julien Chatelet lit ceux de Sean et Josh. Marie-Eve Dufresne lit tous les chapitres dont le narrateur est omniscient.
Je connais peu Marie-Eve Dufresne: sa voix claire et son jeu naturel m'ont convaincue. Je l'entendrai à nouveau avec plaisir.
J'ai été ravie de retrouver Ingrid Donnadieu et Julien Chatelet dont le talent n'est plus à prouver. Ils n'avaient pas la partie facile. Julien Chatelet avait deux rôles. Il a su les différencier de manière subtile. Il n'est donc pas tombé dans le piège du surjeu. Quant à Ingrid Donnadieu, elle devait jouer la colère, le désarroi... elle l'a fait sans exagération.
Je connaissais très peu Lola Naymark. Elle est très bien entrée dans la peau de Lena.
Je n'avais pas été convaincue par Clémentine Domptail lisant «Ça peut pas rater»: je trouvais qu'elle n'était pas dans le ton. Je l'ai préférée dans le rôle d'Erin. Pour moi, elle a su interpréter ce personnage comme il le fallait. Peut-être est-elle plus à l'aise dans des lectures plutôt graves.
D'habitude, je râle quand les comédiens prononcent des noms propres étrangers avec un accent. Ici, il est évident qu'ils étaient obligés de prononcer Djoulse pour Jules, puisqu'en français, Jules est un prénom masculin. De ce fait, ils ont aussi prononcé Djoulia, par souci de cohérence. Heureusement, ils l'ont fait sans affectation.
L'éditeur audio a respecté la structure du roman.
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2 réactions
1 De Eglantine - 06/12/2017, 18:38
Édit de La Livrophile: Attention! Ne lisez pas ce commentaire si vous n'avez pas lu le roman.
Tout à fait d'accord avec vous ! La mort de Kathy n'était pas justifiée, son personnage avait pourtant l'air intelligent et mature, se tuer pour "effacer les preuves" de sa relation avec l'homme qu' elle aime et ainsi le protéger à jamais ? Non, il aurait très bien pu se voir endosser sa mort, être accusé de meurtre. Et puis, le bracelet de Nel ? Il aurait fallu qu' elle le donne à Sean puisque le fermoir était intact ? Bref, j'ai préféré la fille du train.
2 De Babs - 14/03/2019, 18:28
Spoil !
Je suis totalement perdu en lisant la dernière phrase.. Vous finissez le livre en vous demandant qui l'a vraiment tué au final.. comme il est dit dans la critique, "beaucoup" de questions (où est le bracelet? pourquoi kathy s'est suicidée ? Et les autres femmes ? Qui est l'homme mystérieux à l'enterrement?) Et des réponses tout le long du livre plus ou moins réussies pour ne pas dire décevantes.. Mais je pense que le pire est le cas Erinn.. je m'explique, dès son arrivé, elle est introduite comme une mauvaise policière avec un lourd passé professionnel, au final, on apprend qu'elle est décrédibilisée parce qu'elle est lesbienne.. Mouais..
Sinon c'est un livre qui se lit correctement, le temps de s'adapter aux personnages ! Le fil conducteur, la narration, et l'écriture sont plutôt bons ! Si on le compare à la fille du train il est en dessous mais c'est un bon livre !